Je suis en train de lire le livre très intéressant  de Yuval Noah Harari, intitulé « Homo Deus, une brève histoire de l’avenir ». Et dans cet ouvrage, il y a quelques pages que j’ai trouvé très intéressantes pour nous généalogistes. C’est en effet quelques pages de micro-histoire concernant la pelouse.

 

Les pelouses actuellement devant nos pavillons de banlieue sont le résultat d’une longue histoire. Celle-ci ne remonte pas à l’âge des chasseurs-cueilleurs, ni à l’Antiquité. Cette idée a surgi à la fin du Moyen Âge avant de s’enraciner, c’est le terme adéquat s’il en est, au début des Temps Modernes. C’est devenu à ce moment-là la marque de la richesse.

 

Imaginez. La pelouse, cela nécessite du terrain qui ne sert qu’à cela et beaucoup de travail pour bien l’entretenir. Ce n’est donc pas permis à tout le monde. Ce n’est pas un paysan à l’époque qui peut cultiver de la pelouse devant chez lui pour le plaisir. Ce qu’il a devant chez lui, c’est son jardin. Il cultive utile.

 

La pelouse, est-ce vraiment utile ? Ou bien est-ce un luxe ? On n’y fait pas paître les animaux (et pourtant cela aurait pu permettre de l’entretenir mais ils pouvaient aussi la piétiner, crime de lèse-pelouse). A l’époque c’est vraiment un signe extérieur de luxe extravagant.  Plus elle est vaste et soignée, plus la dynastie est puissante. Elle ne sert en outre que quelques jours dans l’année, pour des mondanités importantes. Le reste du temps, elle est interdite d’accès. C’est de là que viennent  nos panneaux « Pelouse interdite ».

 

Ne croyez pas que le passage de la Révolution Française a changé quelque chose concernant la pelouse. Symbole d’autorité elle était avant, symbole d’autorité elle est restée. Toutefois au XIXème siècle la bourgeoisie montante se l’est appropriée.  La pelouse est devenue signe non seulement de pouvoir politique mais aussi de statut social et de richesse économique.

 

Quand sont nés la tondeuse et le tourniquet pour l’arroser, elle a pu petit à petit se démocratiser. Mais elle reste associée au pouvoir, à l’argent et au prestige. En outre, elle a envahi le monde des sports. Enfin, les sports « nobles » : le football, le tennis, le golf, le rugby, l’équitation. Pas les autres. Vous ne voyez pas un cycliste s’entraîner sur de la pelouse, ni un athlète ou un gymnaste. Est-ce que vous pouvez imaginer un parcours de golf sans pelouse ? Ou un match de la ligue 1 ? Plus difficile. Au point que certains stades ont désormais des carrés de pelouse cultivés ailleurs, déposés avant les matches pour que la pelouse soit la plus belle possible au moment de la rencontre.

 

Elle est même sur le point d’envahir le monde islamique.  Un exemple ? Les 100 000 mètres carrés du Musée des arts islamiques au Qatar. Si là ce n’est pas un symbole de richesse et de luxe, je ne sais pas ce que c’est.  Nous sommes quand même en plein désert d’Arabie. Je vous laisse imaginer la quantité d’eau dépensée quotidiennement pour la maintenir verte.

 

Le lien avec la généalogie ? Imaginez que vous trouviez dans un inventaire après décès, une déclaration de succession,  mention d’instruments  permettant de tailler une pelouse.  Ou mention d’un carré, même tout petit, d’herbe dans la description de la maison, des pièces et de ses alentours. Vous pourrez alors de suite comprendre le niveau de richesse de cette famille. Juste avec la mention de ce mot : pelouse.