Eliot est décédé. Il était un petit bout de chou de 2 ans et demi que ses parents ont trouvé mort dans son lit un matin. Il était aussi un de mes cousins. Et depuis une semaine que ses obsèques ont eu lieu, je reste encore bouleversé par celles-ci. Je me rends compte que son décès m’a fait envisager différemment les relations avec ma famille. Et par là-même, aussi, pour quoi je me suis intéressé à la généalogie plutôt qu’à autre chose. J’ai toujours pensé que je m’étais intéressé à la généalogie parce que la famille de ma mère est nombreuse et qu’il m’a fallu à un moment donné comprendre par un tableau qui était parent avec qui. J’ai toujours pensé que c’était aussi parce que les frères et soeur de mon grand-père maternel avaient épousé des cousins mais que la parenté s’était un peu perdue en chemin. J’ai toujours pensé que c’était dû aussi à Joachim, le grand-père maternel de mon grand-père paternel, à sa voix de tonérino dont ses descendants mâles ont hérité. Joachim, dont personne ne devait parler, de même que la naissance de Paul, son petit-fils, était taboue. Qu’Antoine-Joseph et Anne-Joséphine, les parents de ma grand-mère maternelle, y étaient aussi pour quelque chose. On me disait tellement que je ressemblais à Antoine-Joseph parce que je n’aimais pas, comme lui, les pommes de terre bouillies. Antoine-Joseph que je n’ai jamais connu mais dont je voyais le portrait chez ma grand-mère trôner sur le meuble de la salle à manger. J’ai toujours pensé que c’était dû au fait que je m’y suis vraiment intéressé quand mes parents se sont séparés. Mais Eliot est décédé. Et autre chose est venu. Une autre raison. Les liens avec mes cousins germains. La famille proche. Pas de cousins germains du côté maternel. Six, peut-être sept, cousins germains du côté paternel (il en existe un que personne n’a connu mais qui vit quelque part). De tous, je suis le plus jeune et certains sont déjà grands-parents. Je n’ai de contacts réguliers, continus, qu’avec trois : la famille d’Eliot. Et je me dis que, peut-être, ce manque de lien familial, manque en partie du moins, y est aussi pour quelque chose. Travailler sur la famille lointaine parce qu’il existe sans doute un manque sur la famille proche. A la place d’Eliot, cela aurait un descendant d’un de mes cousins que je vois peu (trois fois en 25 ans pour trois de mes cousins), cela ne m’aurait pas fait le même effet. Cette idée n’aurait certainement pas été conscientisée. Je me dis que ma famille proche, celle à laquelle je tiens vraiment, est somme toute tellement réduite que je suis allé, si je puis dire, me créer des liens avec d’autres membres : mes ancêtres. Peut-être. Ce dont je suis sûr c’est que ma recherche de la généalogie, c’est à la fois dû à des ancêtres proches dans le temps dont le souvenir est resté dans les mémoires familiales, à une cassure et peut-être donc à un manque sur la famille proche. Ce dont je suis sûr c’est qu’il n’y a pas qu’une seule raison mais un mélange de plusieurs.