Au cours de mes recherches généalogiques, je suis tombé sur deux noms de famille bien particuliers : Bourbon et Lautrec. Dans les deux cas, il s’agissait de familles roturières. Dans les deux cas, ce nom m’a interpellé.

 

Je vais prendre l’exemple de la famille Lautrec tout d’abord. En 1992 est paru aux éditions Christian un ouvrage intitulé « Les Comtes de Toulouse et leurs descendants les Toulouse-Lautrec : étude historique et généalogique, IXe – XXe siècles », sous la plume de Jacques-René Magné et Jean-Robert Dizel. Au cours de mes recherches généalogiques personnelles, je suis plusieurs fois tombé sur le nom de famille Lautrec, avec ou sans particule, dans des lieux et avec des professions qui m’étonnaient : paysans, tisserands, couturiers, notaires, marchands, bourgeois parfois. Me référant à cet ouvrage, je ne trouvais mention d’eux nulle part. Qui étaient ces Lautrec que je pouvais rencontrer ? D’où venaient-ils ?Ces branches se répartissent sur sept départements pour le moment : le Tarn, l’Hérault, l’Aveyron, la Haute-Garonne, le Tarn-et-Garonne, l’Ariège et l’Aude.

 

Le nom de famille Lautrec a parfois été déformé : Lautrac, Lautret, Lautrey, Lautré, Delautre, Lautrex, Lautrets, Lautres. Tout dépend en fait comment le scripteur entendait le nom. Comme les porteurs de ce nom, pour la plupart, ne savaient ni lire ni écrire, ils n’ont pas fait modifier les erreurs. Cette déformation du nom s’explique assez facilement. En effet, selon Jacques Astor, la lettre c a avancé son point d’articulation en t dans de nombreuses occasions. De même, la chute du c final est assez courante en Occitanie. De même, toujours selon cet auteur, le e tonique latin, qu’il soit fermé ou ouvert, peut se transformer en a en français devant une nasale entravée. Ainsi certains des Lautrec que j’ai trouvé avant la Révolution, écrits alors « Lautrec », sont devenus après la Révolution « Lautre ». C’est le cas notamment de ceux du Pont-de-Cirou, de Monestiés, dans le Tarn, ou de Pézenas, dans l’Hérault. En outre, ne serait-ce que sur le Tarn, nous trouvons à la fois le nom de lieu Lautrec (la commune) et le nom de lieu Lautre. Quatre hameaux portent ce nom dans ce département : commune du Bes paroisse Notre Dame de Guior, commune d’Escroux paroisse Saint Pierre de Lacapelle, commune de Montredon-Labessonié paroisse Saint Salvy de Salclas et commune de Terre-Clapier paroisse Saint Salvy. Pour un au moins, il est situé proche des possessions de la famille de Toulouse-Lautrec. Cela ne serait qu’une coïncidence que ce serait pour le moins étonnant.

 

En ce qui concerne la famille Bourbon, pareillement, je les trouve dans des lieux où les branches nobles ont vécu, du moins les lieux que j’ai étudié actuellement en Midi-Pyrénées, où ce n’est pas vraiment un nom du cru. La coïncidence me paraît encore étonnant. Ce qui m’a le plus surpris, cela a été les quelques mots rédigés par Hervé Pinoteau dans l’ouvrage de Patrick Van Kerrebrouck sur la famille noble. Hervé Pinoteau écrit : « Un bon nombre de personnes ont Bourbon comme patronyme et sans particule : ils sont probablement originaires d’un lieu-dit Bourbon, ou peut-être encore de familles ayant servi des Capétiens de ce nom. » Mais bien sûr ! Je vais le croire ! Surtout que, quand j’ai parcouru l’ouvrage de Patrick Van Kerrebrouck, j’ai constaté que la quasi-totalité des bâtards masculins de la famille noble des Bourbon n’ont pas eu de descendance, même s’ils étaient mariés. Ce qui est statistiquement impossible. Pourquoi ne pas penser plutôt que ces bâtards ont eu une descendance tombée dans la roture, donc « inintéressante » pour les nobiliaires ?