Toujours selon Michaël Porter (en passant, je vous conseille de lire son ouvrage « Choix stratégiques et concurrence » dont je m’inspire car c’est une mine pour qui veut comprendre un secteur d’activité), toujours selon Michaël Porter donc, toutes les firmes d’un secteur sont en concurrence avec d’autres secteurs qui fabriquent des produits de remplacement. Ces derniers limitent les rendements potentiels en imposant un plafond au prix que les firmes peuvent prélever avec profit. Mais comment les identifier ? Tout d’abord en recherchant les produits qui peuvent remplir la même fonction que le produit du secteur. Ce qui peut mener parfois très loin. Ce sont ceux-là qui m’intéressent plus particulièrement dans le domaine de la généalogie. Car il me semble qu’il existe des produits de remplacement dans notre secteur, produits qui se sont mis en place en même temps que l’évolution de celui-ci. Regardons comment s’est mise en place la généalogie. Tout d’abord, il y a eu des amateurs isolés qui ont ensuite thésaurisé leurs compétences en créant des associations. Puis, au vu des restrictions des Archives, notamment par rapport aux documents d’état civil et des registres paroissiaux qui pendant des siècles dormaient tranquilles et qui là étaient non seulement réveillés mais de plus en plus consultés, les cercles de généalogie se sont dits que, pour durer, il fallait mettre en place des campagnes de relevés systématiques d’actes. Faire des relevés c’est bien mais c’est mieux s’ils sont diffusés et s’ils servent à la communauté. D’où au départ le minitel, puis ensuite Internet. Parallèlement à cela, s’est créée une nouvelle profession : le généalogiste familial. Son rôle ? Faire profiter de son expérience d’un dépôt ou de plusieurs dépôts d’archives les gens qui patinent un peu dans leurs recherches, moyennant finances bien sûr. Sauf que le professionnel a omis de servir autrement la communauté généalogique. En effet, à ma connaissance, quasiment pas de sites Internet proposant la vente d’actes de la part des professionnels. Du coup, d’autres ont pris la place. Les actes que les gens trouvent sur Internet, qu’ils peuvent commander en ligne, sont autant d’actes qu’ils ne viennent pas demander aux professionnels. De même, la mise en ligne actuelle des registres d’état civil et des registres paroissiaux par les Archives Départementales sont aussi, à mon sens, un produit de remplacement. Si les gens trouvent les originaux en ligne, gratuitement, pourquoi les demander à un professionnel ? Je vois donc deux produits de remplacement, personnellement : Les actes mis en ligne par les Archives. Les actes mis en ligne par les cercles et les associations de généalogie. Cela va sans doute nécessiter de repenser notre métier, de voir quelles sont nos exactes compétences, notre plus-value par rapport à ces produits. Je crois que ces produits de remplacement sont désormais des facteurs inévitables et qu’il va faloir rechercher une stratégie les intégrant. Nous ne pouvons pas les éliminer ? Alors redéfinissons notre rôle pour faire du généalogiste familial un opérateur de ce secteur compétent, offrons des combinaisons inédites. Allons là où personne ne peut nous prendre la place.