Cette note fait suite à ma note sur la lettre J du challenge AZ. Ecrire une première note sur Joachim m’a forcé à me poser des questions sur lui, notamment sur son premier métier : ouvrier sur cordes de violon. Quel pouvait être ce métier au moment où il est papa pour la première fois, en 1870 ? Pourquoi était-il parti sur Lyon ? Pourquoi a-t-il bougé ensuite à Angers puis à Nantes ? Son métier peut-il être une explication à ses déplacements ? Donc je suis allé fouiller sur Internet. La corde est fabriquée avec la tunique médiane de l’intestin grêle du mouton. L’achat des boyaux se faisait semble-t-il exclusivement à l’automne ou à l’hiver. Et les meilleures cordes venaient des moutons élevés en zone aride (car plus résistants). A mon sens, Joachim fabriquait exclusivement les cordes. S’il les avait accordées, j’aurais vu d’autres mentions que celle d’ouvrier. Or c’est la seule que je lis à son sujet dans les actes de naissance de ses enfants. Joachim commençait par les dessaler dans de l’eau ammoniaquée, en préparant un banc à côté de deux fois la longueur de corde utile (auquelle on ajoutait de 30 à 40 cm) et sur lequel il fixait une perceuse munie d’une brosse circulaire. Une fois la corde dessalée, Joachim accrochait une extrémité de boyau à la brosse et faisait au maximum 5 allers-retours avec le boyau. Il lui fallait éviter les liaisons de boyaux au milieu de la corde pour ne pas faire de noeuds et il devait veiller à ce que la future corde ait une tension égale. En effet,une corde de boyau doit être dans toute sa longueur cylindrique, de même diamètre, élastique, d’une souplesse régulière et de couleur transparente. Un épaississement ou une densité irrégulière de la structure du matériau empêchent un accord tout à fait juste. Une fois cela fait, Joachim faisait tourner la perceuse quelques minutes. Il poussait les tours en essuyant avec la main ou un morceau de cuir pour essorer et régulariser. Il répétait cela autant de fois que nécessaire. Seule l’expérience lui permettait de savoir quand il lui fallait s’arrêter. Joachim laissait la corde sécher puis il la frottait avec une corde de chanvre imbibée de savon noir ou d’huile d’olive. Là encore, le tour de main lui permettait de savoir combien de tours la corde de chanvre allait faire autour de la corde de boyaux. Puis il laissait à nouveau sécher. Il la frottait avec une laine de fer la plus fine possible et recommençait avec la corde de chanvre. il enroulait alors les cordes en anneaux et les passait au soufroir. Le soufroir était le plus souvent un vieux récipient tronçonnique avec couvercle dans lequel on avait mis du soufre pour les barriques (en barre donc). Quand il les avait sorties du soufroir, Joachim retendait les cordes, les repassait à la corde huilée. Elles étaient prêtes à être installées sur le violon. Quatre cordes de sons différents étaient fabriquées : sol (le bourdon), ré, la, mi (la chanterelle). On pouvait filer le bourdon d’un fil d’argent ou d’aluminium. Quatre cordes, donc quatre diamètres différents. Mais, si je connais mieux son métier, il me reste encore plein de mystères qui l’entourent à résoudre. Saurais-je un jour lever ceux-ci ? Soyons positif et disons que oui.