Toujours dans nos discussions entre collègues, il y a une pierre d’achoppement entre nous : Le généalogiste familial est-il ou non un commerçant ? Cela pourrait être notre controverse de Valadolid. A l’époque, on se demandait si les Indiens, tout juste découverts, avaient une âme. Si nous devenons commerçants, d’une manière ou d’une autre, allons-nous perdre la nôtre, celle du chercheur d’archives ? La discussion est ardue. Deux camps se sont formés. Voici quelques pistes de réflexions. Tous les généalogistes familiaux s’éclatent en faisant ce que nous appellons la « recherche pure » : un client nous confie un dossier dans lequel nous devons remonter une partie de sa généalogie. Nous sommes alors en salle d’archives, à consulter l’état civil, les BMS, les registres des notaires, voire d’autres documents en fonction de ce qu’il nous demande ou des pistes que nous pouvons dégager selon les blocages que nous pouvons avoir. C’est vrai que c’est gratifiant, valorisant. Mais…notre départ, c’est quand même l’état civil et les BMS. Il faut d’abord construire l’arbre pour pouvoir ensuite y mettre des feuilles. En cette période de numérisation de l’état civil et des BMS, en cette période de mise en ligne de ces archives numérisées, les généalogistes amateurs ont moins besoin de nous. Pour moi qui suis dans un département où l’état civil et les BMS sont numérisés et mis en ligne, je le constate tous les jours. Christophe et moi n’avons quasiment plus de demandes, ou ponctuelles, de recherches sur le Tarn, notre département de domicile. Heureusement que nous avons 7 autres départements dans notre zone géographique pour pouvoir vivre. Mais ces autres départements numérisent et soit vendront des Cd-Roms soit mettront en ligne. Le danger est bien présent autour de nous. Souvent mes clients se contentent de tout ce qui est état civil et recherches chez les notaires. Très peu, même quand je le leur propose, veulent aller plus loin et mieux connaître la vie de leurs ancêtres. Très peu recherchent des Louis-François Pinagot. Donc, pour ne pas voir son chiffre d’affaires baisser, il faut inventer de nouvelles pistes. Et c’est vraiment là où nous ne sommes pas d’accord. Pour certains, inventer ces nouvelles pistes équivaudrait à devenir un commerçant, à ne pas fournir de vraies réponses aux vraies questions de notre clientèle. Pour ces mêmes, le vrai avenir de notre profession consiste à rechercher et obtenir des prérogatives que le lecteur lambda n’a pas et qu’il sera obligé de venir chercher auprès de nous. Peut-être. La vérité est sans doute ailleurs, au milieu de nos interrogations. Et si nous nous interrogions, une bonne fois pour toutes, sur les besoins de notre clientèle ? Cela ne pourrait-il pas nous donner des pistes de réflexions ?