Quand on fait de la généalogie, il faut faire attention aux sources. Et surtout ne pas se tromper car il en existe plusieurs formes :
La source primaire est le document de première main : le document d’archives pour nous. Celui sur lequel on doit absolument s’appuyer avant d’écrire quoi que ce soit. Sachant que ce n’est pas parce que c’est une source primaire qu’il faut en perdre son sens de la critique. Une source primaire peut parfois mentir . Par exemple, un jugement de noblesse qui omet de produire une preuve ou qui en fabrique. Je parle des jugements de noblesse parce qu’ à plusieurs reprises, en vérifiant les affirmations qu’ils donnaient, j’ai trouvé que l’information était fausse ou erronée, quand elle n’était pas améliorée. Il y a donc un travail de comparaison à faire dans certains cas. Quand vous allez chercher vos sources primaires, vous allez commencer forcément à analyser, à poser des hypothèses. Et il ne faut pas que ce soient vos hypothèses qui priment au détriment de l’information donnée par le document. Ce qui prime c’est le document. Quand vous êtes aux Archives, votre travail c’est de récupérer les sources primaires en toute objectivité. Dans tous les cas, elle n’a pas été retravaillée par la main de celui qui la découvre.
Je vous donne un exemple par rapport aux maintenues de noblesse. Je descends d’une famille de petite noblesse qui s’appelle la famille de Berne. Je trouve la maintenue (d’Hozier donc a priori un source d’archive sûre) qui me dit qu’avant d’Antoine marié dans les années 1548, la famille vient du Nord puis de Suisse. Vérification faite, le nom s’est modifié. Ils s’appellent en fait de Brenas avant cet Antoine et viennent d’un village du Tarn, bien connu : Lautrec (il n ‘y a pas de hasard). Et j’ai trouvé l’information en comparant deux signatures dans deux actes chez deux notaires très éloignés l’un de l’autre : Louis de Berne, sieur de La Capounarié et Louis de Brenas. Leurs signatures étaient identiques. J’aurais pu me contenter de ce que me disait d’Hozier. Je suis allé au delà de cette source.
La source secondaire désigne les travaux historiques se présentant comme des travaux fondés sur des sources primaires et, souvent, la consultation d’autres sources secondaires. Tout ce qui est biographie, prosopographie, monographie, mémoire d’étudiant, état de l’art, compilations… Quand vous rédigez l’histoire de votre famille, vous fabriquez une source secondaire. Parce que vous analysez, vous synthétisez, vous évaluez la pertinence de vos sources primaires, vous les interprétez. Vous ne présentez pas un simple recueil d’actes transcrits les uns derrière les autres avec des fac-similés. Cela demande donc une rigueur méthodologique. Et ce n’est pas forcément un travail facile à accomplir. De même, vous pouvez aller chercher les biographies ou les généalogies antérieures pour faire sur elles aussi un travail identique. Mais le mieux, ce sont quand même les sources primaires retravaillées. Les archives, il n’y a que cela de vrai.
Si je prends l’ouvrage sur les Toulouse-Lautrec, censé être un ouvrage de généalogie de référence sur cette famille, en allant vérifier les archives, je me rends compte qu’il a été écrit à partir de sources secondaires à 99%. Pour un ouvrage de généalogie censé être exhaustif, c’est dommage. Et les quelques sources primaires trouvées donnent des informations fausses. Il faut donc absolument tout reprendre à zéro. Compiler c’est plus facile mais on peut transmettre ainsi des erreurs. En étant sur les archives, j’en trouve au moins une par personnage cité dans celui-ci. C’est un pourcentage d’erreurs beaucoup trop important.
Il existe enfin la source tertiaire. Elle vous permet de trouver les sources secondaires : répertoires, catalogues, bibliographies… Pour les archives et toute autre source primaire, ce sont les inventaires. Sans eux, la recherche serait fastueuse. Il faut donc apprendre à s’en servir. Dans tous les cas, elle n’est pas exhaustive. C’est souvent un choix fait par l’indexateur en fonction du budget qu’on lui alloue ou des consignes d’achat qu’on lui donne (quand il s’agit d’ouvrages).
Dans les sources tertiaires, il faut y mettre aussi Internet. Attention à sa pertinence et à sa visibilité. Là encore, il faut exercer son esprit critique. Attention aux fake ! On ne le répétera jamais assez ! La généalogie que vous trouvez sur Internet donne-t-elle ses sources primaires ? Non ? Allez TOUT vérifier, c’est impératif. Ne la diffusez jamais sans ce travail de vérification préalable et elle doit vous servir en attendant de document de travail et rien d’autre. Partez du principe qu’une généalogie diffusée qui n’a pas de sources primaires n’est pas une généalogie fiable. Vous êtes sur Internet donc source tertiaire.
3 réponses à “Les sources, les sources et … Les sources”
Elémentaire mon cher WATSON!
Merci de rappeler des évidences, avec une nuance quant aux sources primaires, même vérifiées, et qui peut se résumer par cet aphorisme « errare humanum est », en généalogie peut-être encore plus qu’ailleurs. Car la génétique met à mal pas mal d’arbres qui abritent des coucous..
Bonne journée Stéphane.
Martine
Quand une source nous dit ce que nous voulons entendre, alors nous avons un moment d’hésitation, bien naturel. Il m’est arrivé de garder une certaine source qui me plaisait, et puis, bon, voilà, on se dit que découvrir la réalité peut être tout aussi intéressante, et du coup très émouvante. J’ai donc abandonné cette source pour aller plus loin et beaucoup plus éprouvant, mais quelle richesse, tout compte fait !!
Donc : SED PERSEVARE DIABOLICUM.
Cordialement
Joëlle Sigal
Bonjour Stéphane,
je vais la faire à l’envers. Je vais commencer par le tertiaire, ce que font la plupart des personnes qui débutent leur généalogie (et peut-être, non sûrement tout ceux) qui veulent faire du chiffre. A ce niveau ce n’est qu’un substrat. Les sources tertiaires, un régal pour le fainéant ou celui qui veut se la péter auprès des ses amis ou ses followers, car il ne faut pas se le cacher, ces personnes publient sur internet, et polluent. Malgré tout, pour ceux qui veulent aller au fond des choses, ne pas les négliger (mais vraiment quand on n’a plus de solution) car cela peut parfois débloquer des situations. Ca peut donner une piste, une nouvelle orientation. Mais on prend ces sources avec des pincettes, des gants de protection et des lunettes de soleil pour ne pas être ébloui.
Les sources secondaires, leurs lumières attirent le papillon généalogiste que nous sommes. Enfin un personnage digne de foi, qui a fait ses propres recherches, mais qui ne donne pas toujours ses sources, qu’importe. Pourquoi ne pas lui faire confiance ? Je descends de Charlemagne, il le dit ! Il a édité des livres, il est reconnu par ses pairs. Alors, pourquoi douter ? Tout simplement parce qu’il manque LA chose qui nous guide, LA SOURCE.
La fameuse source primaire. Et encore. Même si on a la source primaire, dans certains cas, comme vous l’évoquez, il reste ce que j’appelle le pouillème de doute qui fait qu’on a encore un titillement au fond de nous qui nous susurre à l’oreille : « t’as peut-être tort ! ».
Juste pour le fun : la source de la Loire. Comme cet article, on connaît trois sources :
– la source authentique
– la source géographique
– la source véritable
Mais je vous rejoins complètement à 200 pour cent.
Cordialement,
Georges