Ce sont peut-être de fausses interrogations. C’est peut-être une manière de voir différemment mon environnement. Pour le moment, je ne le sais pas. Ce dont je me rends compte, c’est qu’il y a actuellement abondance dans le domaine de la généalogie. Autrement dit, et cela peut paraître bizarre de l’écrire ainsi, la matière première « généalogie » est devenue gaspillable. Ce qui me l’a fait réaliser, ce sont quelques paragraphes de Chris Anderson que j’ai grapillé dans son ouvrage sur l’économie du gratuit : Et plus les produits sont faits d’idées au lieu de matière, plus vite ils peuvent devenir bon marché. C’est la racine de l’abondance qui mène à la gratuité dans le monde numérique, ce qu’on résume aujourd’hui sous l’expression « loi de Moore ». Mais cela ne se limite pas aux produits numériques. Toute industrie dans laquelle l’information devient l’ingrédient principal aura tendance à suivre cette courbe d’apprentissage composée : ses performances progresseront tandis que ses prix baisseront. Si les transistors (exemple pris par l’auteur pour démontrer la loi de Mead) deviennent trop peu coûteux pour qu’on les compte, alors cessons de les compter et de réfléchir à leur coût. Renonçons à les conserver comme un bien rare et traitons-les comme la fourniture abondante qu’ils sont. Autrement dit, on devrait littérallement se mettre à les gaspiller. Alan Kay avait compris que le rôle du technologue n’est pas de trouver à quoi peut servir la technologie. C’est de faire qu’elle soit si peu coûteuse, si aisément utilisable, si répandue que n’importe qui puisse l’utiliser, de sorte qu’elle se propage à travers le monde et envahisse toutes les niches possibles. Nous utilisateurs, nous trouverons quoi en faire car nous sommes tous différents. Ces paragraphes posés un peu au hasard peuvent surprendre. En fait, je me suis dit, en les regroupant, qu’actuellement nous sommes en complète et totale possibilité de gaspiller les données généalogiques. Entre les associations qui dépouillent et qui mettent sur le net, les Archives qui mettent sur le net, les particuliers qui mettent leurs arbres sur le net, nous avons plétore d’information. Elle ne devient plus rare, comme elle pouvait l’être il y a disons 20 ans. Son coût diminue, d’où à mon avis la raison de ces pétitions qui circulent contre l’exploitation rémunérée de la donnée généalogique. Par contre, ce qui restera toujours rare, c’est la capacité de chacun de l’exploiter cette donnée généalogique. Et il me semble que c’est là que se situe désormais la véritable question du prix dans le domaine de la généalogie. Parce que nous sommes tous différents, que nous avons tous la possibilité de remplir différemment ce chaudron qu’est la donnée généalogique. En tant que professionnel, ce que je fais payer, ce n’est pas de l’information généalogique, comme je pouvais le faire à la naissance de ce métier, c’est désormais ma capacité de trouver de nouvelles exploitations de cette donnée, c’est aussi ma capacité de pouvoir la trouver plus rapidement, de posséder les bons outils, les bons réflexes au bon moment. Ce que je peux faire payer ce sont mon expertise et ma créativité à partir de ce matériau brut qu’est la donnée généalogique. Du coup, je peux devenir en quelque sorte de plus en plus ambitieux dans les projets que je peux mettre en place, à m’attachant à des fonctions d’un ordre plus élevé, à de nouveaux marchés. Nous ne sommes, je crois, qu’au début de l’exploitation de la donnée généalogique abondante. Parce que nous n’avons de seule limite que notre imagination.