Les pratiques culturelles des Français sont radiographées tous les dix ans par le département des études du Ministère de la Culture. Cette année, la nouveauté vient de la mention « à l’ère numérique ». En effet, en 1997, la dernière mouture, seul un ménage sur cinq disposait d’un ordinateur et moins de 1% des Français surfaient sur Internet. Aujourd’hui, les deux tiers des Français sont équipés d’au moins un ordinateur et plus de la moitié ont une connexion haut débit. Les pratiques ont donc forcément changé. Quatre modèles sont désormais clairement définis dans leurs pratiques culturelles. Quatre modèles ? Disons plutôt quatre générations : La première génération est née avant la Seconde Guerre Mondiale. Elle a grandi dans un monde où l’imprimé régnait en maître incontesté et ont découvert la télé. Elle se retrouve très peu concernée par la révolution numérique. La deuxième génération est celle des baby-boomers. Elle a profité de l’ouverture du système scolaire et du développement des industries culturelles. Le livre continue d’avoir une place centrale chez eux. Les trento-quarantenaires ont vécu la révolution du paysage audiovisuel des années 80. C’est la génération des radios privées, du multi-équipement en famille, de la télécommande, des programmes en continu et des baladeurs. Bien évidemment, ils ont très vite compris quelles étaient les potentialités du numérique. Les moins de 30 ans ont biberonné avec la dématérialisation des contenus et l’ADSL à haut débit. cette génération incarne les appareils nomades, aux multiples fonctionnalités, au croisement de la culture, de l’entertainment et de la communication interpersonnelle. L’étude a permis de constater qu’Internet accentue les inégalités car il renforce les appartenances et les goûts déjà existants. On sait aussi que les goûts des nouvelles générations changent et se perpétuent quand leurs membres vieillissent. Les écrans sont devenus le support privilégié de nos rapports à la culture, ce qui accentue la porosité entre deux mondes, celui de l’art et celui du divertissement. Culture et distraction, culture savante et populaire, tout est mélangé. Il suffit d’un clic pour passer du plus distractif au plus érudit, voire même faire les deux en même temps. Cela me fait réfléchir sur la clientèle des généalogistes. A priori, elle se situe actuellement principalement dans les deux premières générations. Je me dis que si on veut pouvoir toucher les deux autres générations, pour pouvoir perdurer comme métier, il va falloir s’adapter à leurs manières de consommer de la culture. Segmenter peut-être au maximum le marché pour permettre des combinaisons de plus en plus complexes, pour que l’intime puisse être exprimé de manière privilégié. Qu’y a-t-il de plus intime que, non pas la généalogie, mais l’appartenance à une famille ? Ne faudra-t-il pas changer notre vision ? Je crois que, au vu de cette étude, la question mérite d’être posée.