Pour une fois, histoire de changer un petit peu d’air, j’avais envie de vous raconter une anecdote trouvée au cours de mes recherches. Elle m’a semblé tellement particulière que j’ai eu envie de vous la faire partager. Je l’ai intitulée : le divorce aux cèpes. Nous sommes en 1885, le divorce vient d’être autorisé à nouveau. Césaire est marié à Orancie, demoiselle de bonne famille, catholique pratiquante, de qui il a eu six enfants. Mais Césaire s’ennuie avec Orancie et est donc allé voir si l’herbe était plus verte ailleurs. Il a rencontré une demoiselle accorte, plaisante, et, à cette époque où la contraception est quasi-inexistante, il est arrivé ce qui devait arriver : ladite demoiselle a accouché d’une petite Justine. Césaire est bien embêté mais reconnaît l’enfant comme lui appartenant, née de ses oeuvres. Cette naissance, à laquelle il ne s’attendait pas du tout, a été un déclic pour lui. Césaire demande le divorce et quitte le domicile conjugal pour s’installer avec la maman de Justine. Catastrophe pour Orancie ! J’ai pu retrouver les négociations entre Césaire et Orancie, notamment ce qu’a écrit Orancie pour faire changer son mari d’avis. Elle traite bien sûr la demoiselle de gourgandine, de courtisane et la voue aux gémonies. Il est hors de question pour Orancie d’accepter ce que lui demande son mari. Divorcer, jamais ! Sa religion le lui interdit. Et puis quelle honte pour leurs enfants ! Qui voudrait s’unir avec un enfant de divorcé ? Personne bien sûr ! Veut-il vraiment cela pour ses enfants ? Elle est persuadée que non. Une partie de ses divers courriers m’a intrigué. Orancie demande à son mari de revenir, qu’elle veut bien accepter la séparation de corps de bien, à la rigueur, mais pas plus. Et surtout, elle a pris un avocat à qui elle écrit son incompréhension. Son Césaire a quitté le domicile conjugal, certes, mais… il a laissé toutes ses affaires. Il n’a rien déménagé ! La seule chose qu’il a emporté avec lui ? Des conserves de cèpes ! Et rien d’autre ! Certes, il les avait fait cueillir. Mais sans plus. Ce n’est pas à un homme de s’en occuper ensuite. Cette tâche avait été réservée à la domesticité. Pourquoi ces conserves de cèpes ? Elle n’en sait rien. Va-t-il revenir ? Son avocat peut-il l’éclairer sur ce point ? Malheureusement, non ! Comment l’affaire s’est-elle terminée ? Césaire est revenu au domicile conjugal (avec les conserves de cèpes auxquelles il n’avait pas touché) mais… pas seul. Justine et sa mère l’accompagnaient. La séparation de corps et de bien a été prononcée. Et Orancie a continué de voir une autre faire des enfants à son mari après avoir obtenu ce qu’elle voulait. Mais à quel prix ?