Le 31 octobre 1607, devant Me Bourguet, notaire de Milhars, le seigneur du lieu décide de se faire construire un tombeau digne de son rang et de son statut social. Il est en effet seigneur de plusieurs places, gentilhomme de la chambre du roi, capitaine de 50 hommes d’arme qu’il commande lui-même. Être enterré sous une simple dalle comme ses ancêtres ? Que nenni !
Il sait parfaitement ce qu’il veut comme tombeau. Et pour cela il fait venir Scipion Bertin, Me tailleur de marbre, habitant Toulouse près de l’église Saint Michel. Il lui paiera le logis, le lit, le chauffage pendant 3 mois, deux hommes pour scier, frotter les marbres (car il le veut en marbre et rien d’autre), faire porter le grès et le sable nécessaire, lui fournira la lumière soir et matin et il lui donnera en plus 120 livres, y compris 43 livres pour une scie, une pierre ponce, pour acheter la poudre d’étain et la dorure.
Il veut que son tombeau soit de marbre entièrement constitué et sur le sépulcre de ses prédécesseurs. Il veut que la grande pierre de marbre dans l’église de 12 pans de long et 4 pans de large tant au dessus qu’au dessous soit parée. Une fois cela fait, tout au long que du large, Scipion Bertin fera une feneille sans gâter la pierre et tout alentour il fera une moulure. Le dessus bien poli, il gravera les armoiries de sa maison sans y faire aucun chiffre ni autre chose.
Dans l’église se trouvent quatre colonnes de marbre. Scipion Bertin les posera et les mettra sur les quatre carrés du tombeau et au-dehors de celui-ci. Le seigneur fera faire quatre bases de pierre blanche à un maçon, de même qu’une voûte et des murailles nécessaires pour faire et garnir le tombeau et y poser la grande pierre et les piliers.
Il devra couper la feneille en trois pièces : une pour la table et deux pour garnir le tombeau de chaque côté dont une sera de 3 pans de large. Cette dernière sera polie de même que la grande pièce. Sur chacune, Scipion Bertin gravera les armoiries de Charles de Cazilhac ainsi que celles de sa défunte femme Suzanne des Cars, avec les vers bien dorés.
Mais le tombeau n’est pas fini pour autant. Scipion Bertin devra scier des colonnes plus longues, une pour fabriquer un bénitier qui sera poli pour être mis avec un pivot de fer au fond du tombeau et les autres seront entre les premières colonnes gravées et polies. Vers la tête, il mettra une autre pièce de marbre de même couleur d’une pan et demi de long.
Une fois le tombeau terminé, Scipion Bertin recevra le solde. Le premier paiement se fera le 15 août 1608, c’est ce que nous dit en marge de l’acte une quittance. Ce qui m’interpelle c’est cette feneille. Je n’ai réussi à trouver exactement de quoi il s’agissait. Mais est-ce elle qui est polie, avec une moulure et les armoiries gravées ou bien est-ce une autre pièce ? Pour qu’elle soit divisée en trois pièces, j’ai tendance à penser que c’est une autre pièce qui a les armoiries. Je vois mal le Me tailleur de marbre graver des armoiries puis couper au risque de les abîmer.
Je n’ai pas réussi à trouver une image de ce tombeau, ni à savoir s’il existe encore dans cette église de Saint Pierre es Liens. Mais au vu de la description, il devait avoir de la gueule.