Découvrir des nouveaux documents est toujours un vrai plaisir. Hier, aux Archives Départementales du Tarn, j’ai pu ainsi ouvrir le livre de la sacristie des trinitaires de Castres, conservé en série H.  Un vrai bonheur à lire. Dans ce document, qui va de 1670 à 1714, bien évidemment, nous avons la liste des messes que les trinitaires font quotidiennement ou presque. Mais nous avons aussi  les élections de sépulture et les descriptions des enterrements.

 

Aujourd’hui , j’ai envie de vous parler d’un enterrement un peu particulier. D’habitude, quand ils parlent d’enterrement, les trinitaires sont  assez succincts : ce jour a été enterré la fille de Lalause.  Mais parfois ils sont un peu diserts.

 

Le 27 août 1670, les trinitaires écrivent ainsi sur la mort de Madame la comtesse de Clairmont, pour respecter leur orthographe mais il s’agit beaucoup plus vraisemblablement de Madame de Clermont. Nous avons en effet sur la paroisse Saint Laurent d’Auterive la famille de Clermont du Bosc. Elle est décédée vers les trois heures de l’après-midi ce jour-là.

 

Par son testament, elle laisse ses entrailles dans leur église, son corps à Espalion et son coeur à Castelnau.  Elle laisse aussi 400 livres aux trinitaires pour qu’ils prient Dieu pour le repos de son âme.

 

Elle décède à Castres mais elle demande à ce que son corps soit enterré à Espalion. Il faut donc faire face à un phénomène : la décomposition du cadavre. Que faire pour retarder cette décomposition ? Eviscérer bien sûr !  L’intestin est l’organe qui est le plus rapidement corruptible . D’où son enlèvement immédiat. De même pour le coeur. Ils seront déposés dans deux coffres séparés. Le corps est ensuite embaumé avec du vin, des aromates, quelques fois du sel. Dans l’espoir de pouvoir retarder cette décomposition, ne serait-ce que le temps du voyage vers la sépulture choisie.

 

Le lendemain, les entrailles sont enterrées près de l’autel, du côté de l’évangile. Le 29 août vers les vingt-et-une heures,  son corps est porté dans l’église pour y être mis en dépôt jusqu’à ce qu’on le porte à Espalion. Castelnau ? Le coeur ? Ils n’en parlent pas du tout. Le 31 août, la messe est dite.

 

Enfin… Presque… Parce que pour ce qui est du corps… Cela a un peu traîné. Heureusement qu’il était embaumé et vraisemblablement dans un cercueil en plomb. Cela évite les odeurs.  Se faire enterrer à Espalion ? Mais quelle idée ! Bon d’accord, elle l’a demandée dans son testament. Mais elle est décédée, non ? Alors doit-on forcément respecter ses dernières volontés ? C’est la question que se pose son fils.  Et il se la pose longuement. Très longuement. Très très longuement.

 

Le 9 novembre 1671, son fils vient, enfin !, récupérer le corps de sa mère dans l’église des trinitaires. Tout compte fait, Espalion pour lui c’est une mauvaise idée. C’est là que voulait être sa mère mais non ! Son fils décide que, tout compte fait, elle sera enterrée aux Carmes déchaussés de Toulouse. Après tout, c’est là que feu son mari repose du sommeil éternel.

 

Alors mieux vaut qu’ils soient ensemble. Dommage pour Espalion !