Le 26 avril 1891, en leur foyer situé au Castanié commune de Cadix, Jean-Baptiste Nègre et Sophie Imbert accueillent  une petite fille qu’ils  prénomment Marie Nathalie Lédovie Louise. Personnellement, j’en ai  toujours entendu parler sous le nom de « Tata Maria ». Je connaissais un peu sa vie et puis, il y a quelques jours, une bombe à fragmentation m’est tombée dessus.

 

Je m’explique.

 

Tata Maria est la soeur aînée de mon grand-père maternel Célestin.  Je savais qu’elle s’était mariée une première fois le 24 juin 1911 à Cadix avec Ludovic Théophile Baudy. Elle est la seule de la fratrie à ne pas avoir épousé un parent, proche ou éloigné. De Ludovic, elle aura deux enfants mort-nés avant qu’il ne parte à la guerre en 1914. Ludovic n’en reviendra d’ailleurs pas. Il périra en effet le 26 février 1916 lors du naufrage du Provence II. Le 21 août 1920, elle épousera dans la mairie du 17ème arrondissement de Paris un Breton, Victor Jean Auguste Pierre Marie Hervé. De qui elle n’aura pas d’enfant. Elle est décédée à Réquista le 22 janvier 1964.

 

Voilà ce que je connaissais de sa vie. Certes des anecdotes par-ci par-là comme quoi elle avait tenu pendant des années un café à Paris ou concernant son caractère, sa volonté de marier une de mes tantes à un époux qu’elle avait choisi pour elle (ce qui ne s’est pas fait parce que ma grand-mère y a mis le holà dès qu’elle l’a appris). J’ai de même quelques photos d’elle. Une vie semblait-elle banale.

 

Et là, il y a quelques jours est tombée une bombe à fragmentation. A fragmentation car la recherche va devoir se faire internationalement, elle qui n’a jamais quitté la France.

J’apprends lors d’un repas de famille que Tata Maria et Tonton Victor sont descendus de Paris à Réquista au moment de la Seconde Guerre Mondiale. Propriétaires d’un café, ils avaient mis celui-ci en location. Voyant que la Guerre se prolongeait, ils étaient remonté le temps de le vendre. Jusque là je connaissais l’histoire. rien de nouveau croyais-je. Mais quelle était mon erreur !

 

Et là, j’entends : « Et pendant la guerre, ils ont caché un couple de Juifs dans leur maison à Réquista. Ce couple restait enfermé dans une chambre et n’allumait que la nuit, n’ouvrant la fenêtre de même. » PARDON  ? Est-ce que j’ai bien entendu ? Et c’est maintenant que vous me le dîtes ?

 

Je n’en suis pas encore revenu. Je sais qu’il va me falloir interroger mes tantes (ma mère était trop jeune à cette époque pour n’avoir d’autre souvenir que cette information). Ne serait-ce que pour savoir qui était ce couple. Venait-il de Paris ? Se sont-ils connus là-bas ? Où est-il parti ensuite ? Avait-il des enfants ? Des descendants que je puisse retrouver, leur en parler.

 

Est-ce que je vais pouvoir leur faire reconnaître ce statut de Juste parmi les Nations auprès de Yad Vashem ? J’aimerais bien. Si c’est possible, mais vu comment leurs critères sont stricts… Ce sera un parcours difficile qui m’attend. Ne serait-ce déjà que pour obtenir plus d’informations auprès de la famille sur cet épisode.

 

Bref, je ne suis qu’au début de l’enquête en sachant qu’une grande partie de l’information est partie. Il est trop tard pour interroger mes grands-parents par exemple. Et là, là, là suivant ce que je peux trouver, je note absolument tout. C’est devenu trop important à mes yeux.