Un jour de Toussaint, aller au cimetière est pour moi une évidence. Cela ne veut pas dire que je ne pense pas aux morts de ma famille le reste du temps. Mais ce jour-là est particulier comme pour beaucoup de personnes je suppose.  Et puis le 2 novembre, vrai jour de la fête des morts, c’est plus compliqué d’y aller. Ce n’est pas férié. Alors c’est le jour de la fête de tous les saints que je vais leur faire un de ces petits coucous rares mais importants.

Rentrer dans le cimetière. Aller au caveau « Famille Nègre-Delmas », deuxième allée à gauche en entrant, troisième caveau à gauche. Tiens, ils ont nettoyé la croix du prêtre, Waouh, j’aurais jamais cru qu’elle était aussi belle sous sa couche de pollution et de mousse ! Regarder rapidement les chrysanthèmes achetés. Tiens cette année ce sont des vrais ! Ne pas regarder les roses ou la lavande entourant le caveau.  Car je ne suis pas là pour ça.

Je suis là pour eux : Pierre-Joseph Delmas (1834-1914), Marie Canivenq (1839-1938), Anne-Joséphine Rigoulat (1871-1954), Antoine-Joseph Delmas (1867-1956), Célestin Nègre (1900-1985) et Mathilde Delmas (1898-2000). Simplement eux.

Être à côté de la tombe, la main posée dessus. Sentir la rugosité du marbre sous les doigts. Le caresser yeux fermés en sentant le vent sur mon visage. Un signe de croix. Un autre… Puis un troisième. Anne, si elle était là, me ferait la remarque « pas de la main gauche ! » Sourire à cette pensée. Fermer les yeux et oublier les conversations alentour (« C’est Madame Bessières, elle mange de la soupe tous les jours midi et soir. Parce que la soupe à Lanuejouls, elle est bonne ! » SILEEEEEEEENNNNNCE ! Allez le dire dehors !). Essayer de me recueillir. Être juste là, avec eux, pour un moment. Les remercier de leur amour. Leur en donner à mon tour, même allongés là, reposant pour l’éternité. S’ils savaient combien j’ai aimé les connaître, en vrai ou parce qu’on me parlait d’eux. Je les ai aimés. Le leur ai-je suffisamment dit ? Je ne sais pas. Mais je les ai aimés de toutes mes forces. Les valeurs qu’ils m’ont transmises et qui font que je suis moi, c’est eux. Le respect qu’ils m’ont appris, si important à mes yeux. Ils vivent désormais à travers moi. Être dans l’ici et le maintenant, main posée sur la pierre.  Yeux fermés.

Et devoir les quitter, hélas ! Un dernier coup d’ oeil sur la tombe. Revenir lentement vers la réalité. Impossible de rentrer tout de suite. Besoin de marcher. Besoin d’être dans la nature. De communier encore avec eux. Mes pas me mènent vers la Fontblanche, derrière chez eux. M’asseoir sur un banc. Penser encore un peu à eux. Avant de laisser la réalité reprendre le dessus.

Toussaint !